Titre original : Rosemary's Baby
Réalisateur : Roman Polanski
Avec : Mia Farrow, John Cassavetes, Ruth Gordon, Sydney Blackmer...
Date de sortie : 1968
Pays : USA
Date de sortie : 1968
Pays : USA
Note : ♥♥♥♥♥
Un autre film avec la note maximale, aujourd'hui : Rosemary's Baby, thriller horrifique de Roman Polanski. Le film est fidèlement adapté du roman éponyme d'Ira Levin, écrit en 1967.
L'histoire : Rosemary (Mia Farrow) et
Guy (John Cassevetes) Woodhouse forment un jeune couple qui emménage
dans un nouvel appartement à New York. Lui est un acteur qui a du mal à
percer, elle est femme au foyer et compte bien avoir des enfants. Les
Woodhouse font la connaissance de Roman (Sidney Blackmer) et Minnie
(Ruth Gordon) Castevet, leurs voisins de palier, vieux et excentriques,
avec lesquels Guy se lie d'amitié...
Bientôt, Rosemary tombe enceinte. Dès
lors, les Castevet se montrent excessivement gentils et serviables à son
égard, prennent Rosemary sous leur aile, et deviennent vite
envahissants. Parallèlement, Guy a subitement un succès gigantesque dans
sa carrière de comédien. La nuit, Rosemary entend des murmures étranges
venant de chez ses voisins, comme s'ils se livraient à une cérémonie
religieuse... Lentement, la jeune femme plonge dans un monde d'angoisse
et de paranoïa, persuadée qu'on en veut à son futur bébé.
Avec Rosemary's Baby, Roman Polanski nous prouve encore une fois, après Répulsion, Le Couteau dans l'eau ou encore Cul-de-Sac,
qu'il est maître dans l'art de mener le suspense et de semer la
confusion chez le spectateur jusqu'à la dernière minute du film. Pendant
deux heures, le spectateur est perpétuellement amené à douter :
Rosemary est-elle réellement victime d'une improbable conspiration, ou
bien est-elle simplement paranoïaque ? Les breuvages vitaminés que lui
apporte gentiment la vieille Minnie Castevet sont-ils offerts de bon
coeur, ou contiennent-ils quelque drogue ou herbe maléfique ? Les
griffures que porte Rosemary à son réveil, un matin, ont-elles vraiment
été causées par un mari un peu trop fougueux ?
Rosemary's Baby n'est pas un
film d'horreur à proprement parler, mais Polanski sait faire peur à son
public, et ce depuis les premières minutes du film. Quelques détails
étranges, quelques plans inhabituels, une réplique lancée de façon
déroutante... et l'angoisse monte chez le spectateur, avant même qu'elle
n'apparaisse chez les personnages. Ainsi, par exemple, cette commode
placée par l'ancienne locataire de l'appartement devant la porte d'un
placard ; les personnages s'interrogent sans toutefois s'inquiéter, mais
la musique et la nature du cadrage nous fait comprendre que quelque
chose ne va pas. Ou encore lorsque, après un dîner chez les Castevet,
Rosemary fait remarquer à Guy que les voisins ont retiré tous leurs
tableaux des murs ; Guy en rit, pas nous. Ou bien ces rêves que fait
Rosemary, qui n'ont à première vu rien d'effrayant mais qui nous
terrorisent littéralement...
Visuellement, Polanski utilise plusieurs
procédés propres à générer la peur et l'empathie chez le spectateur,
notamment la caméra quasi-subjective. Celle-ci suit le personnage de
très près, de dos, comme si nous étions dans la scène, en train de
marcher juste derrière Rosemary dans un quelconque couloir obscur - ah,
Polanski et ses couloirs, ses interminables couloirs sombres et vides !
Le film ne comporte aucun plan d'ensemble (mis à part celui, vu
d'hélicoptère, de la séquence d'ouverture) mais se concentre sur ses
personnages, évoluant dans l'appartement, comme un huis-clos oppressant,
tout en gros plans et en lents travellings.
Le casting, comme toujours chez Roman
Polanski, est irréprochable. Mia Farrow est idéale en Rosemary,
femme-enfant aux cheveux courts et au teint blafard, qui respire
l'innocence et la candeur. John Cassevetes, à la fois attirant et
machiavélique, correspond parfaitement au personnage de Guy Woodhouse,
dont on ne sait s'il est un mari aimant ou un conspirateur maléfique. Le
couple Castevet est également fort bien incarné par Ruth Gordon et
Sidney Blackmer, septuagénaires souriants et sympathiques, et pourtant
un rien malsains.
Mention spéciale à la bande sonore du
film, qui lui apporte en grande partie son ambiance particulière. La
première scène est mémorable notamment à cause de sa musique : on y voit
un long plan aérien sur le futur appartement du jeune couple, avec le
générique écrit en rose vif dans une belle écriture calligraphiée ; et
en fond, une berceuse pour enfants, sans autres paroles que "la-la-la-la-la",
chantée par Mia Farrow elle-même. Le séquence pourrait être anodine,
elle devient angoissante. On entendra la même berceuse, associée au même
plan, à la fin du film.
En dehors de cette mélodie lancinante, Rosemary's Baby est
quasiment dépourvu de musique. En revanche, un soin tout particulier
est apporté aux effets sonores. Toutes les séquences se déroulant dans
la chambre de Rosemary et Guy, par exemple, sont uniquement rythmées par
le tic-tac répétitif d'un réveil posé sur la table de chevet. Lorsque
Rosemary rêve, on continue à entendre ce même tic-tac, sans aucun autre
son ou musique parasite (sauf, bien sûr, les dialogues prononcés par les
personnages, réels ou en rêve).
Rosemary's Baby est un
film grandiose, au scénario impeccable et à la distribution remarquable,
qui témoigne une fois de plus de la fascination malsaine de Polanski
pour le satanisme et les sectes - le film fait directement écho à la
tragédie qui marqua la vie du réalisateur, soit l'assassinat de sa femme
Sharon Tate, enceinte de huit mois, un an après la sortie de Rosemary's Baby. Une œuvre mêlant horreur, suspense et fantastique, à ne pas manquer.
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