Réalisateur : Maïwenn Le Besco
Avec : Marina Foïs, Karine Viard, Maïwenn, Muriel Robin...
Date de sortie : 2009
Pays : France
Date de sortie : 2009
Pays : France
Note : ♥♥♥♥
"Je pense qu'on ne fait pas ce métier si on n'est pas névrosé."
Lors de sa sortie, Le Bal des Actrices
ne m'a absolument pas attirée. À vue de nez, je considérais le film
comme une énième comédie dramatico-romantique française, dont la
promotion est basée sur les visages d'une belle brochette d'actrices
connues et appréciées du public - Julie Depardieu, Karin Viard,
Charlotte Rampling, Jeanne Balibar, Muriel Robin, Marina Foïs... Je
n'avais pas non plus prêté attention au premier long-métrage de Maïwenn
(soeur de l'actrice Isild Le Besco), un drame autobiographique appelé Pardonnez-moi (2006) ; je ne connaissais donc rien du style extrêmement particulier de la jeune réalisatrice.
Le Bal des Actrices est en
effet à l'opposé du film français de base dont le public est si friand.
Il est à vrai dire difficile de déterminer s'il s'agit d'un documentaire
ou d'une fiction. Le concept est extrêmement original : toutes les
actrices jouent leur propre rôle, et Maïwenn joue également le sien :
celui d'une jeune réalisatrice qui, équipée d'une petite caméra
numérique, désire approcher toutes ces femmes afin de tourner son second
long-métrage, un documentaire visant à révéler leur vrai visage, loin
du glamour et de leur image de célébrité inaccessible. La
quasi-totalité du film est vu à travers la caméra de Maïwenn, suivant
les actrices dans leur vie quotidienne, sur leurs tournages, pendant
leurs séances de Botox...
On ne sait jamais exactement quelles
parties du film sont écrites, et lesquelles sont entièrement prises sur
le vif, comme un véritable documentaire. Les acteurs sont tous d'un
naturel si désarmant qu'on oublie totalement qu'il y a une part de
fiction dans tout cela. Lorsque Maïwenn suit ses actrices sur leurs
tournages, on aperçoit les vrais réalisateurs des vrais films qu'elles
tournent : Bertrand Blier, Jacques Weber... Les seuls rôles fictifs du
film sont celui du médecin de Marina Foïs, interprété par l'acteur
Laurent Bateau, et le producteur de Maïwenn, joué par Nicolas Briançon.
Le rappeur Joey Starr fait ses débuts au cinéma en interprétant
(toujours dans son propre rôle) le mari de Maïwenn - d'une façon si
réaliste que j'étais réellement persuadée qu'ils étaient mariés à la
ville, avant d'apprendre que Maïwenn était en fait l'épouse d'un homme
tout à fait différent (Joey Starr a d'ailleurs reçu un César pour sa
prestation).
Le Bal des Actrices nous révèle
donc le "vrai" visage (jusqu'à quel point ?) de toutes ces actrices
connues, les dévoilant sans maquillage, mal coiffées, au sortir du lit,
en plein caprice de star, en larmes après une audition ratée, en pleine
dispute avec un réalisateur peu compréhensif... Le tout filmé caméra au
poing, comme n'importe quel reportage. On y croit pendant toute la durée
du film, trouvant ces femmes tour à tour sympathiques, touchantes,
exaspérantes, prétentieuses ou hilarantes. Maïwenn glisse aussi dans son
film une certaine critique du show-business français, notamment grâce
au personnage arrogant de son producteur, un homme qui accepte de
financer son film uniquement si elle filme "de vraies actrices à la mode"
(et il lui cite Estelle Lefébur...) ou encore le personnage d'une jeune
réalisatrice branchée qui recherche uniquement des comédiennes
"populaires" (Cécile de France et Marion Cotillard...).
La fin du film est une mise en abîme tout sauf happy end
: lors de la projection en avant-première de son film, Maïwenn se fait
huer par toutes les actrices qui y figurent, se plaignant qu'il s'agit
davantage d'un documentaire sur elle-même que sur les actrices. Le film
subit un tel tollé que le producteur décide de le retirer du marché,
annonçant la nouvelle à une Maïwenn en larmes. Cette fin contraste
évidemment du tout au tout avec la réalité, dans laquelle Le Bal des Actrices
eut un accueil triomphal autant public que critique, et nous rappelle
que tout ce qu'on vient de voir n'était qu'une mise en scène. Comme avec
Pardonnez-moi, on sort du film avec un sentiment de confusion
totale entre réel et fiction, se demandant à quel point ces actrices ont
réellement accepté de se "mettre à nu" devant la caméra inquisitrice de
Maïwenn.
Le seul point du film que je n'ai pas
apprécié - même si je reconnais l'audace et l'originalité de l'idée -
est que de temps à autre, le film est coupé par une séquence chantée,
façon comédie musicale, où chacune des actrices interprète tour à tour
une chanson qui lui correspond. Les couleurs et les costumes sont d'un
kitsch qui contraste étrangement avec le réalisme pointu du reste du
film, peut-être pour nous rappeler que nous avons affaire à une fiction
plus qu'à un documentaire... mais je suis restée insensible à ces
séquences clippesques et artificielles.
En dehors de ces scènes, le film est
passionnant, et on se fiche, finalement, que ce qu'on voit soit vrai ou
faux ; on y croit à chaque seconde, et c'est l'essentiel. Même si
certains points sont entièrement mis en scène, on devine qu'il y a
indéniablement une grande part de vérité chez toutes les actrices,
qu'elles sont davantage elles-même qu'un personnage qui ne leur
correspond pas. Le film ne comporte ni scénario ni trame narrative, mais
on suit avec plaisir et curiosité ces moments de vie crus et sans fard
de toutes ces femmes qu'on ne voit d'habitude que dans des rôles
fictifs.
Le deuxième long-métrage de
Maïwenn est à la fois en rupture et en continuité avec son film
précédent - toujours autobiographique, toujours proche du réel, mais en
se concentrant cette fois non pas sur elle-même mais sur d'autres
personnes. Son style unique en fait un film déroutant et surprenant,
mais qu'on regarde avec beaucoup de plaisir. C'est donc avec une
certaine impatience que j'attends Polisse, le troisième long de la réalisatrice, prévu pour fin 2011.
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